Ce nouveau site Actualités de la recherche de l’Université Paris Nanterre a été lancé le 3 février.
Afin de mieux répondre à vos attentes et d’améliorer ce service, nous aimerions recueillir votre retour d’expérience.
Votre avis est précieux ! Nous vous invitons donc à répondre à une courte enquête qui ne vous prendra que quelques minutes.
Un grand merci d'avance pour votre participation.
L’équipe Point Commun : Bonjour, merci d’avoir accepté de répondre à nos questions. On commence par un sujet qui nous concerne toutes et tous : les produits qu'on décide d'acheter… ou pas.
Allégations d'écoresponsabilités, labels suspects, greenwashing… Malgré une pléthore d'arguments marketing, il reste encore très ardu de distinguer les achats réellement vertueux de ceux ne le sont pas autant qu'il le prétendent. Quelles sont les "fausses bonnes idées" les plus répandues ?
Béatrice Bellini :
L’économie circulaire qui se focalise le plus souvent sur la gestion en aval des déchets et qui vient renchérir le maintien d’une économie linéaire toujours centrée sur des objectifs de croissance de vente de produits
L’approche de dons, philanthropique, déconnectée du cœur de métier de l’organisation et qui permet à cette dernière de maintenir son modèle d’affaires en donnant une partie de son résultat à une ONG, sans pour autant garantir de bonnes conditions de travail au niveau des acteurs de ses filières d’approvisionnement
Le recours à l’écoconception de produit comme argument commercial pour, là encore, toujours avoir pour objectif de vendre plus.
→ "Vêtements, alimentation : quel impact environnemental ?" Lors de cet atelier ludique, le samedi 14 octobre, Béatrice Bellini pour propose de musclez vos choix de consommation en explorant les étiquettes et les affichages environnementaux des produits que nous côtoyons chaque jour.
Que vous soyez déjà très renseigné ou au contraire un peu perdu, vous allez forcément apprendre des choses lors de cet atelier.
Béatrice Bellini : Je trouve essentiel de communiquer de manière plus importante sur la complexité de la situation pour faire face aux enjeux de développement durable, à la fois économiques, sociaux et écologiques. Il est nécessaire d’avoir une idée de l’impact réel des mesures proposées et qu’il 'n'existe pas une solution idéale mais des compromis nécessaires.
Face à de tels écueils, le consommateur (qui peut, en quelque sorte, "voter avec son porte-monnaie"), se trouve donc bien en peine pour savoir quels achats favoriser. Quelles sont les solutions possibles afin de distinguer les produits alignés avec son éthique personnelle, de ceux qui la bafouent allègrement ?
Béatrice Bellini : Il faut avoir conscience que la situation est complexe.
Tout d’abord, au niveau des impacts environnementaux qui sont multicritères (eau, air, sol, déchets…) et multi-étapes (approvisionnement, production, distribution, consommation et fin de vie). Ainsi une solution peut contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais en augmentant la consommation d’eau.
Puis, il y a les impacts sociaux qu’il faut absolument connecter : pas question d’améliorer un impact écologique en dégradant les conditions de travail dans la filière.
Enfin, il y a la dimension économique, indispensable pour assurer la pérennité de l’organisation, mais qui reste encore trop prioritaire pour toutes les entreprises, car les outils de pilotage restent centrés sur cette performance.
« […] une solution peut contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais en augmentant la consommation d’eau. »
Béatrice Bellini
En résumé, le consommateur doit avoir conscience qu’il n’existe pas de produit ou de service idéal ; le seul comportement vertueux garanti est lié à la réduction de la consommation.
Pour modérer mes propos, il est cependant possible de changer le fait de satisfaire un besoin de manière moins impactante en remplaçant l’achat de biens par l’achat de leurs usages. Cela permet de réduire les impacts globaux et d’inciter à concevoir des produits à longue durée de vie mais cela nécessite un vrai changement de modèle pour l’entreprise, difficile à mettre en place, compte tenu des approches de rentabilité court-termistes. Cette nouvelle approche s’appelle l’économie de fonctionnalité.
« 20% de la pollution des eaux mondiales est causée par l’industrie textile. »
La “fast fashion” est régulièrement pointée du doigt mais elle n’est pas la seule coupable. Qu’est-ce qui va changer avec la Loi AGEC de 2020 ? ce qui a déjà changé ? Quelles sont les limites de ses dispositifs ?
Béatrice Bellini : La loi AGEC ne contribue pas à changer les modèles d’affaires des entreprises car elle est surtout focalisée sur la gestion de déchets. Elle impose l’intégration de matières recyclées qui, dans l’industrie du vêtement par exemple, contribue à réduire leur durée de vie, ce qui ne va pas vraiment dans le bon sens.
Pour aller plus loin concernant les vêtements, rendez-vous sur le sur le site de l'ADEME :
Béatrice Bellini : La question de l’impact global n’est jamais clairement mentionnée et les mesures adoptées peuvent paraître de bonnes idées sans pour autant en être, comme la diabolisation du plastique qui malgré tout, peut avoir de vrais avantages comme éviter le gâchis via les emballages.
« [...] pas question d’améliorer un impact écologique en dégradant les conditions de travail dans la filière. »
Béatrice Bellini : Il faut toujours se poser la question de l’impact et ne pas se laisser aller à l’illusion de la connaissance. NON, un produit recyclé n’est pas forcément écologique…
« Il est nécessaire [...] de garder à l’esprit qu’il n’existe pas une solution idéale mais seulement des compromis »
Béatrice Bellini
C’est quoi le “cycle de vie d’un produit” ?
Béatrice Bellini : Il correspond aux différentes étapes de la vie d’un produit, soit l'approvisionnement, la production, la distribution, l’utilisation et la fin de vie. Il ne faut surtout pas le confondre avec le cycle de vie en marketing qui correspond aux étapes d’évolution sur un marché.
Vous êtes chercheuse en sciences de gestion, quels sont vos sujets d’étude ?
Béatrice Bellini :
Le marketing “responsable“ dont l’objectif est de caractériser la qualité sociale et environnementale du produit et de service afin de la valoriser économiquement pour satisfaire aux enjeux du développement durable.
La transition des modèles d’affaires et le développement de nouvelles méthodes comptables pour mieux appréhender les enjeux et pouvoir mettre en œuvre des solutions adaptées.
Quelle est votre discipline et ses particularités ?
Béatrice Bellini : Je travaille en sciences de gestion de manière transdisciplinaires en abordant les différents champs (marketing, stratégie, logistique, finance, comptabilité…) de manière à avoir une approche globale permettant de dépasser la réflexion en silos qui nuit souvent à l’efficacité des solutions étudiées.
Décrivez-nous votre unité de recherche ? Les thématiques transversales. Les collègues (ici ou ailleurs) avec lesquels vous travaillez.
Béatrice Bellini : Le CEROS est un laboratoire regroupant des chercheurs en gestion divisés actuellement en 3 axes : marketing, organisation et finance (pour faire simple), ce qui limite le travail ensemble par projet, rendu difficile par les impératifs de publications et leurs exigences.
Béatrice Bellini : Une chaire UNESCO est une structure qui travaille en partenariat avec l’UNESCO afin de faire progresser les connaissances et les pratiques dans un domaine jugé prioritaire par des actions de recherche, des formations et des actions de sensibilisation. Pour notre chaire, il s’agit de faire évoluer les pratiques et enseignements en sciences de gestion de manière à ancrer les dimensions sociale et environnementale dans les fondamentaux des modèles de prises de décisions, et non de manière “accessoire”.
Quel est le cheminement qui vous a mené à cette responsabilité ?
Béatrice Bellini : Mes recherches dans le domaine de la protection de l’environnement ont commencé il y a 30 ans, donc mes différentes expériences m’ont conduite à initier ce projet pour avoir les moyens d’aider à un développement plus responsable.
Vous enseignez aussi, comment ces deux activités s'imbriquent-elles ? Béatrice Bellini : J’essaye de lier mes activités liées à la chaire au sein de mes enseignements. Cela apporte des opportunités de développer avec les étudiants des projets concrets avec des organisations partenaires et ainsi contribuer à élargir leur champ de compétences sur des enjeux essentiels, notamment en marketing.
Vous avez assisté à la première formation de media training lancée par l’université au printemps 2023. Qu'avez-vous retiré de cette expérience ?
Béatrice Bellini : C’était une formation très intéressante où l’on a abordé la forme des messages et les façons de les rendre plus accessibles. La mise en situation est toujours enrichissante.
Eh bien justement, les membres de la communauté scientifique de l'Université sont invités à la seconde session de ces atelier !
Comment expliquer votre recherche en quelques minutes de manière efficace ? Comment écrire pour les médias et avoir de l'impact ? Comment se préparer pour une interview ?Découvrir les 3 → sessions entre le 16 et le 23 octobre. (Sessions doctorales à venir)
→ "Vêtements, alimentation : quel impact environnemental ?" Lors de cet atelier ludique Béatrice Bellini pour propose de musclez vos choix de consommation en explorant les étiquettes et les affichages environnementaux des produits que nous côtoyons chaque jour.
Que vous soyez déjà très renseigné ou au contraire un peu perdu, vous allez forcément apprendre des choses lors de cet atelier.
Béatrice Bellini : Je trouve essentiel de communiquer sur la complexité de la situation pour faire face efficacement aux enjeux de développement durable, à la fois économiques, sociaux et écologiques. Il est nécessaire d’avoir une idée de l’impact réel des mesures proposées et toujours garder à l’esprit qu’il n’existe pas une solution idéale mais seulement des compromis nécessaires.
Bref, ne pas se laisser entrainer par de fausses bonnes idées !
Toute la programmation de la Fête de la Science 2023
Béatrice Bellini : Les rencontres humaines, les échanges enrichis des différentes perspectives de chacun en fonction de leurs expériences et de leurs origines disciplinaires. Il est aussi très motivant de monter des projets à l’international et de co-construire des outils s’adaptant aux différences culturelles.
C’est notre petit instant « Rainer Maria Rilke » !
Quels conseils donneriez-vous à un·e jeune qui s’intéresse à votre domaine de recherche ?
Béatrice Bellini : De venir travailler avec nous !
Et pour finir, c’est le moment pour faire de la « réclame »
Où puis-je suivre les actus de vos recherches ?
Béatrice Bellini : Je n’aime pas faire la promotion sur nos activités ; d’ailleurs quelle est ma légitimité pour dire que nos travaux sont intéressants et utiles. Nos interlocuteurs nous remercient souvent pour la richesse des échanges et certains déplorent souvent de ne pouvoir contribuer à nous aider dans le développement d’outils de management.. Comme beaucoup de projets, nous manquons de ressources mais nos collaborations diverses confirment régulièrement l’intérêt de nos actions, ce qui contribue fortement à notre motivation.